Rio Chagres et traversée du Canal de Panama (mars)
En 6 min, une ballade en video dans le Rio Chagres.
Après notre second séjour aux îles San Blas, nous décidons de passer encore quelques jours au calme dans la jungle du Rio Chagres avant l'effervescence qui accompagnera notre passage du Canal de Panama. Cela nous permet d'avancer l'école de Nils, de ranger le bateau et de l'inspecter de fond en comble afin de voir que tout est en ordre. Car une fois dans le Pacifique on ne pourra compter plus que sur nos modestes capacités pour réparer ce qui ne va pas, jusqu'à ce qu'on arrive à Tahiti en octobre prochain. Alors c'est un peu comme la répétition générale avant le passage dans l'autre océan.
Le Rio Chagres se trouve dans un parc national qui entoure le Lac Gatun et certaines parties du Canal de Panama. Ce parc s'étend sur une grande superficie et est couvert d'une jungle épaisse avec une faune très variée: jaguars, tapirs, toucans, crocodiles, paresseux, singes hurleurs, etc... La biodiversité de cette forêt primaire est remarquable et il est très étonnant de trouver un endroit si sauvage à 6 miles de la zone portuaire très active de Colon. Il faut dire que la densité et l'inhospitalité de cette jungle est telle que pas grand monde ne s'y aventure. Les arbres sont si grands et nombreux que l'on ne peut pas s'orienter avec un GPS au sol car le signal satellite ne passe pas.
Nils est aussi impressionné que nous et regarde aux jumelles des toucans, singes et perroquets dans les arbres.
Nils est aussi impressionné que nous et regarde aux jumelles des toucans, singes et perroquets dans les arbres.
Les premiers colons tentèrent de traverser l'isthme de Panama en remontant avec leurs galions ce Rio aussi loin qu'ils le pouvaient, pour ensuite continuer à pied. Mais la malaria, les animaux sauvages et la densité de la jungle eurent souvent raison de leur courage. Alors, pour nous, c'est un privilège de pouvoir remonter ce fleuve sur plus de 6 miles et de se retrouver au mileu d'un endroit autrement inaccessible. Une barre de sable et des hauts-fonds encombrent un peu l'entrée du fleuve où il faut slalomer, mais ensuite la profondeur varie entre 10 et 15 mètres même très proche du bord ce qui rend le Rio Chagres navigable quasiment jusqu'au barrage du Lac Gatun.
Le Lac Gatun est un lac artificiel qui a été formé par la construction du barrage ci-dessus. Cela a innondé un vaste territoire lors de la construction du Canal de Panama permettant de rejoindre les écluses Gatun côté Atlantique et les écluses de Pedro Miguel et de Miraflores côté Pacifique. Ainsi, lorsqu'on traverse le Canal, on navigue durant 20 miles sur le Lac Gatun avant de passer dans le Gaillard Cut, une énorme tranchée de 10 miles creusée à main d'homme au début du 20ème siècle. L'histoire de la construction du canal est fascinante et il existe un bon nombre d'ouvrages la relatant.
Avec le dinghy on part en exploration dans les petits affluents du Rio Chagres. On entend et voit des oiseaux de tous côtés. Les enfants guettent aussi les crocodiles. Autant dire que l'on ne croise personne.
On approche la fin de la saison sèche et la saison des fruits commence, même si certains arbres n'ont pas encore leurs feuilles. Estelle est au pied d'un grand arbre au tronc faisant comme des draperies.
Les petits explorateurs en route. On essaye de ne pas se perdre car il n'y a pas de sentier et pas de repère visuel. On s'est bien couvert et sprayé pour se protéger des insectes. Mais à notre grande surprise nous ne voyons presque pas de moustiques et le sol est très sec car on est à la saison sèche.
Quoi de mieux comme terrain de jeu?
Nils a déjà allumé le moteur et est impatient d'aller faire une "exploration".
Vue prise par Huaras depuis le haut du mât. Quand je vous disais plus haut qu'on a inspecté le bateau de fond en comble!
Ciel ce qu'il est haut ce mât. On est quand même mieux en bas.
Le matin, l'humidité se dégageant de la forêt forme des bancs de brume donnant une atmosphère presque automnale pour nous qui sommes devenus habitués aux cieux bleu azur.
Alors Tim ces crocos, ils sont où?
Eh bien, pour tout vous dire, on les a frôlés de près. En rentrant transpirants d'une promenade en forêt avec nos longs habits, Maman n'a rien trouvé de mieux que de proposer une petite baignade vite-fait à l'arrière du bateau à ses 3 petits. Le Papa un peu sceptique est resté seul sur le bateau.
Au bout de quelques minutes dans l'eau, la Maman fut prise d'un doute: "Au fait les crocodiles ils chassent quand? Tu crois qu'il y en a ici?" s'inquiéta-t-elle. Pas besoin d'en dire plus pour que le sourire de tous se fige et que vite tout ce petit monde sorte de l'eau. Un petit moment plus tard Huaras voit une grosse forme faire un gros splash puis plein de bulles et à nouveau un gros splash et des bulles. A ce moment-là, la Maman se rend compte qu'elle a fait une grosse bêtise!
Eh bien, pour tout vous dire, on les a frôlés de près. En rentrant transpirants d'une promenade en forêt avec nos longs habits, Maman n'a rien trouvé de mieux que de proposer une petite baignade vite-fait à l'arrière du bateau à ses 3 petits. Le Papa un peu sceptique est resté seul sur le bateau.
Au bout de quelques minutes dans l'eau, la Maman fut prise d'un doute: "Au fait les crocodiles ils chassent quand? Tu crois qu'il y en a ici?" s'inquiéta-t-elle. Pas besoin d'en dire plus pour que le sourire de tous se fige et que vite tout ce petit monde sorte de l'eau. Un petit moment plus tard Huaras voit une grosse forme faire un gros splash puis plein de bulles et à nouveau un gros splash et des bulles. A ce moment-là, la Maman se rend compte qu'elle a fait une grosse bêtise!
Nous quittons la jungle du Rio Chagres et nous approchons de l'entrée du Canal et de la zone portuaire de Colon. La présence de tous ces cargos venus du monde entier est impressionnante. On se faufile entre ces géants des mers et on va à la marina de Shelter Bay pour quelques jours.
La digue protégeant la zone portuaire et l'entrée de Colon est impressionnante.
Nils cocole sa petite soeur.
Nous faisons un très gros avitaillement: plus de 2000 dollars US, soit environ une dizaine de caddies de supermarché ou encore trois tickets de caisse appondus totalisant plus de 5 mètres de longueur (cf photo!). Tout cela à acheter, à transporter puis à ranger dans le bateau avec trois enfants plein de vie tournant autour, c'est dire si la tâche ne fut pas aisée. Nous regardons tous les emballges pour en vérifier la propreté, transvasons les céréales, la farine, les graines, le riz, etc.. dans des récipients hermétiques pour éviter la contamination par des petites bêbêtes.
La préparation de liste de commission ne fut pas toute simple. Comment calculer ce qu'on va manger pendant les 3-4 prochains mois? Heureusement, l'expérience de la transat et du Cap-Vert nous avait déjà appris à ne pas commettre certaines erreurs. Comme ne pas acheter trop d'aliments de base que l'on trouvera de tout façon partout en route dès que nous sommes dans des zones habitées. Par contre, stocker ce qu'on ne trouvera pas avant d'atteindre la Polynésie ou plutôt Tahiti. Alors par exemple, le filet de boeuf à 13 dollars le kilo, ça on n'a pas hésité à en mettre plein le congélateur sur la demande express de notre carnivore favori (lire: Huaras). Le chocolat, le birchermüesli, le nutella, le fromage, les bons biscuits pour le goûter et le saucisson ont aussi rempli les caddies. On a trouvé important de satisfaire les goûts de toute la famille, car lorsqu'on est en mer la préparation des repas rythme les journées et ils prennent une autre saveur que lorsqu'on a tout à portée de main.
Voilà notre Oniva prêt à partir pour la traversée du Canal. Nous sommes tellement chargés que la ligne de flotaison en a pris un sacré coup.
Pour traverser le Canal nous devons avoir 4 équipiers à bord pour tenir les lignes dans les écluses en plus du pilote qui est obligatoire. Pour cela, nous avons demandé à nos sympathiques voisins de ponton à la marina, s'ils seraient intéressés de faire un premier passage du Canal avec nous avant de passer eux-même avec leur bateau, comme Huaras l'avait fait avant pour nous. Et voilà Frank et Valérie du catamaran Kouunji avec nous sur Oniva. En plus, nous avons croisé par hasard Fred, un skipper professionnel ayant quelques jours à remplir avant le passage du bateau de son client. Finalement Mauricio, un linehandler professionnel qui fait passer le Canal aux bateaux depuis 10 ans, totalisant près de 1500 passages du Canal à lui seul. Huaras pilotera le bateau sur les conseils du pilote et moi je m'occuperai de l'intendance, nourrir tout ce petit monde, faire les photos et m'occuper des enfants.
Nils est tout content car depuis le temps qu'on lui parlait de ce fameux passage!
Nos amis du bateau Kouunji, Valérie et Frank.
Belles couleurs au coucher du soleil.
Un tug-boat ou bateau-remorqueur qui tire ou guide les gros cargos jusqu'à l'entrée des écluses.
Voici un cargo rempli de voitures. Quel franc-bord imposant. On se demande comment il fait pour passer les écluses. En fait, les plus gros cargos sont construits aux dimensions du Canal. Dans les écluses, il ne leur reste de libre qu'un pied à babord et un autre à tribord. Des locomotives se chargent tant bien que mal à faire en sorte que leurs coques ne touchent pas les murs en béton. En ce moment, un chantier pharaonique a lieu à côté du Canal existant pour construire un deuxième canal plus profond et plus large afin de permettre de construire des cargos d'encore plus grande taille. Rien de global sustainable development là-dedans...
Voilà le pilote qui arrive et salue le capitaine. On va enfin pouvoir passer après plus de 2 heures d'attente sur les flats.
La nuit était tombée lorsqu'on entre dans la première écluse. Ce fut chaotique et très mal organisé. Le capitaine de l'écluse voulait d'abord nous faire passer 3 catamarans de face dont un faisait 80 pieds de long (nous faisons 44 pieds). Nous avons refusé trouvant cela trop large et totalement déséquilibré en puissance de moteur et en taille. Ensuite, il a essayé de nous faire passer à couple d'un bateau à moteur beaucoup plus lourd que nous et d'un catamaran très léger. De bonne volonté, on a essayé de s'attacher en radeau, mais le bateau à moteur ne répondait pas correctement aux ordres des pilotes et, étant beaucoup plus lourd que les deux catamarans réunis, il nous a mis en travers juste devant la première écluse avec, en plus, un vent de 20-25 noeuds qui nous faisait dériver.
En urgence, et sur notre demande afin d'éviter d'aller s'écraser contre un des murs devant l'écluse, nous avons décidé de larguer les amarres et de défaire le radeau. Les autorités portuaires s'impatientaient et nous menaçait de nous faire passer un autre jour. Nous n'étions pas d'accord de passer en formation dangereuse et non-équilibrée. Après moultes palabres, les autorités ont été d'accord de nous laisser passer à couple de l'autre catamaran à peu près de même taille que nous sans le bateau à moteur. C'est là que la première expérience de traversée du Canal d'Huaras comme équipier sur un autre bateau a vraiment été utile car on a osé s'opposer à ce qu'avaient prévu les autorités et qui, à notre sens, était totalement inadéquat et dangereux. En effet, lors de sa première traversée, Huaras avait vu trois catamarans passer ensemble et les deux situés à l'extérieur du radeau ont eu leur coques abîmées contre les murs en béton des écluses.
En urgence, et sur notre demande afin d'éviter d'aller s'écraser contre un des murs devant l'écluse, nous avons décidé de larguer les amarres et de défaire le radeau. Les autorités portuaires s'impatientaient et nous menaçait de nous faire passer un autre jour. Nous n'étions pas d'accord de passer en formation dangereuse et non-équilibrée. Après moultes palabres, les autorités ont été d'accord de nous laisser passer à couple de l'autre catamaran à peu près de même taille que nous sans le bateau à moteur. C'est là que la première expérience de traversée du Canal d'Huaras comme équipier sur un autre bateau a vraiment été utile car on a osé s'opposer à ce qu'avaient prévu les autorités et qui, à notre sens, était totalement inadéquat et dangereux. En effet, lors de sa première traversée, Huaras avait vu trois catamarans passer ensemble et les deux situés à l'extérieur du radeau ont eu leur coques abîmées contre les murs en béton des écluses.
Finalement, après beaucoup de stress et d'énervement, la porte des trois premières écluses s'est ouverte et nous avons pu rentrer paisiblement dans l'écluse avec l'autre catamaran. Nous avons eu beaucoup de chance d'avoir un pilote formidable qui nous a écoutés et nous a soutenus pour que nous passions en toute sécurité dans une formation adéquate, contrairement à ce que voulaient improviser le capitaine de l'écluse.
Nos équipiers ont vraiment été à la hauteur et on les voit là en pleine action. Mais pour compliquer un peu les choses, comme si cela ne suffisait pas, au lieu des 2 hommes qui normalement doivent tenir les lignes, à la deuxième écluse il n'y en avait plus qu'un qui courrait en avant et en arrière. Donc, à chaque mouvement du bateau, il fallait relancer les lignes alors que s'ils avaient été deux, ils marcheraient sur les murs en tenant les lignes du bateau d'une écluse à l'autre. Lorsque je demande à Mauricio où est le deuxième homme, il me répond: "No sé, probablemente borracho!" (trad.: Je ne sais pas, probablement bourré!). Et dire qu'on paie près de mille dollars pour ce service... sans commentaire. Restons zen!
Nos équipiers ont vraiment été à la hauteur et on les voit là en pleine action. Mais pour compliquer un peu les choses, comme si cela ne suffisait pas, au lieu des 2 hommes qui normalement doivent tenir les lignes, à la deuxième écluse il n'y en avait plus qu'un qui courrait en avant et en arrière. Donc, à chaque mouvement du bateau, il fallait relancer les lignes alors que s'ils avaient été deux, ils marcheraient sur les murs en tenant les lignes du bateau d'une écluse à l'autre. Lorsque je demande à Mauricio où est le deuxième homme, il me répond: "No sé, probablemente borracho!" (trad.: Je ne sais pas, probablement bourré!). Et dire qu'on paie près de mille dollars pour ce service... sans commentaire. Restons zen!
Nils est très impressioné par la hauteur des murs et par cette ambiance nocturne très spéciale.
Les parents qui décompressent. Finalement, tout s'est bien passé lors de la première écluse.
Il est déjà très tard et Estelle vient juste faire un petit au revoir avant d'aller au lit. Tim lui n'a rien vu de tout ce cafouillage car il était endormi déjà depuis longtemps.
Enfin la dernière des 3 écluses est franchie et on se dirige vers le mouillage du lac Gatun.
Tout est bien qui finit bien. On a eu chaud. Merci à notre pilote et aux quatres équipiers qui ont été magnifiques lors de cette soirée de plaisance très spéciale!
Frank et Fred encore en pleine forme en profitent pour faire les clowns sur la bouée d'amarrage du lac Gatun. Tous les bateaux sont rectangulaires (ou triangulaires), mais les bouées sont rondes. Simple pour se mettre à couple! La nuit sera courte car il est pas loin de minuit quand on a fini de manger.
Ce que le soleil est haut et fort proche de l'équateur! Notre ombre est réduite au minimum. On croise un long pétrolier dans le Gaillard Cut.
Un porte-containers imposant et chargé à ras-bord. Pas étonnant que parfois il y ait un ou deux containers qui tombent à l'eau.
Toute la famille devant le Centenario Puente. Les trois dernières écluses approchent.
Tout d'abord l'écluse de Pedro Miguel avec, heureusement, un relativerment petit cargo derrière nous tenu au centre par les locomotives.
Les portes s'ouvrent vers le lac de Miraflores.
Estelle explique à son doudou comment on passe les écluses.
Voici la première écluses de Miraflores avec une foule de spectateurs sur les balcons et la webcam nous regardant depuis le visitor center.
Ce qu'ils sont hauts ces murs! Tu es perplexe Frank?
Et voici enfin la dernière écluse. Youpie! Le Pacifique nous ouvre ses portes.
Un vaste sentiment de soulagement nous envahit ainsi qu'une grande émotion à l'idée d'avoir franchi une étape importante et définitive du voyage.
Le fameux Pont des Amériques. Le Pilote est satisfait de nous avoir guidés sans encombre cette fois-ci. Le Capitaine aussi!
Et voilà, nous sommes passés de l'autre côté. L'île de Taboga est en arrière-plan avec les cargos en attente. Nous sommes bien dans le Pacifique. Nous nous amarrons quelques jours à une bouée à la Marina (pourrie et très désagréable) de Punta Culebra. On se rend compte tout de suite que les Caraïbes, c'est fini. Place à autre chose. Moins touristes des mers. La plaisance, telle qu'elle se pratique côté atlantique, n'existe plus de ce côté-là. Place à l'aventure plus authentique, comme ils disent...
Cependant, pour commencer en douceur, nous allons retourner dans la civilisation en visitant quelques jours Panama City et en chargeant cette fois-ci le bateau de produits frais. C'est la dernière grande ville que nous verrons avant Papeete. Certains produits ou pièces détachées ne seront plus disponibles aussi facilement qu'ici. Pour aller loin, il faut savoir prévoir...
Cependant, pour commencer en douceur, nous allons retourner dans la civilisation en visitant quelques jours Panama City et en chargeant cette fois-ci le bateau de produits frais. C'est la dernière grande ville que nous verrons avant Papeete. Certains produits ou pièces détachées ne seront plus disponibles aussi facilement qu'ici. Pour aller loin, il faut savoir prévoir...